La cuisine comme résistance et fidélité - récit du Val des Sources
Publié le
Laetitia Chalandon

Il y a eu beaucoup d’évolution dans la gastronomie avec des simplifications qui font gagner du temps. Dans notre cuisine, on ne gagne jamais de temps. Au contraire ! On accepte de le perdre en le prenant ! C’est notre identité.
Chloé Gueydan, Cheffe au Val des Sources
Le train qui me mène dans les Hautes-Alpes peine à pénétrer les reliefs rocailleux, tousse et se reprend. À la fenêtre, les reflets d’or défilent dans les feuillages, au rythme d’un lent mouvement. Les mélèzes se dressent sur le bord des rails, cachant puis dévoilant des bocages encore préservés. Des lignes de haies de hêtres, de bouleaux forment un quadrillage qui paraît aléatoire mais qui constitue un dessin longuement entretenu par des siècles d’histoire agricole. Traversés par des cours d’eau, ils abritent une grande diversité d’oiseaux, de chauves-souris, de fleurs.
Première halte à Gap. Ville au pied des sommets. La gare, au cœur d’un cirque, dévoile les futurs possibles de contacts avec les montagnes pelées du massif des Écrins, du Dévoluy et du Colombis. Un paysage déroutant lorsque l’on est habitué à des hauteurs plus verdoyantes. Ici, le climat méditerranéen domine la montagne. Ligne aride : une terre rouge, aux accents noirs que je devine puissante. Surmontée d’une herbe éternellement jaunie, asséchée par le vent, par des hivers rudes et l’absence de pluie. L’activité agricole occupe 50 % des surfaces, dont 65 % en agriculture biologique.
Mais ce n’est qu’un préambule. Je remarque des cultures de lentilles, de pommes, de coings le long de la vallée du Valgaudemar. S’y aventurer se fait dans l’ombre des époques. Les ambiances, les maisons, les visages des chansons de Jean Ferrat se rencontrent ici. Illusion d’un monde figé dans son identité modeste et fière.
Ce pays, je le sens, cache une diversité hors du temps. L’attachement des personnes que je rencontre est unanime et me surprend. Ils y sont retenus par une attractivité puissante, gravitationnelle. Et ils y sont engagés pour le faire vivre. Une volonté incarnée sur les terres de l’hôtel-restaurant Le Val des Sources, situé sur la commune de Saint-Maurice-en-Valgaudemar, à 930 m d’altitude. J’y suis accueillie pour 24 h, ce 18 octobre, à l’occasion de la traditionnelle fête de la Chèvre.
Troisième femme cheffe au Val des Sources
Un pays rude et lumineux
Chloé Gueydan, 28 ans, vient de reprendre l’affaire familiale et incarne la troisième génération des femmes cheffes se succédant au Val des Sources. Lorsque son histoire m’a été rapportée, j’ai tout de suite pensé à l’évolution de la restauration dans le milieu montagnard : son lien avec le tourisme, l’activité agricole locale et surtout l’évolution des attentes des clients, des modes et des paradoxes du tourisme. Et surtout, j’ai été intriguée par cette singularité : trois femmes se passant le flambeau depuis 1965 pour faire perdurer une histoire d’accueil et de cuisine, en lien avec son terroir.
Particulièrement encaissé, le Valgaudemar est une entaille dans le massif des Écrins. Je suis venue une première fois, au cœur du mois d’août. Partie sous un ciel mitigé pour une baignade optimiste dans l’eau glacée de la Séveraisse, j’ai assisté aux grondements terribles de mon enfance, lorsque, prisonniers de l’altitude, les nuages se rassemblent en une sombre armée impénétrable. l’affluent de la Drac, affiche un caractère faussement calme en été. Elle peut rugir dans de terribles crues, et exprimer toute la force des sommets, toute la vie libre et indomptable vibrant autour du mont Olan. Réfugiée dans un petit tabac, l’électricité sautant au rythme des éclats de foudre, j’assiste au basculement du monde humain vers sa vulnérabilité. Mais je n’ai pas peur. Je connais cette musique montagnarde. Les réflexes enfouis reviennent et la joie à l’idée de sortir les bougies renaît comme une madeleine. Arrivée entre chien et loup au Val des Sources, je n’en distingue pas tous les contours.
Chloé nous accueille sous un hangar. Deux musiciens se préparent pour un concert acoustique. Les couvertures polaires sont distribuées. Les sourires sont accrochés au public, heureux de l’accalmie et de la douceur retrouvée ; la soirée s’annonce presque magique. Dans la loi de la montagne, les humains trouvent une petite place et se délectent de la félicité qui leur est permise.
Et Chloé est comme une comète de joie dans cet univers de nuit. Lumière éclairée par un bonheur sincère à recevoir ses convives, elle passe des cuisines de son restaurant aux étals dressés avec soin pour la scène ouverte. Elle dégage une chaleureuse maîtrise et une passion évidente. Dans la nuit avancée, nous nous promettons une prochaine rencontre, à l’automne.
Et nous y sommes. Arrivée dans cette atmosphère chatoyante d’octobre. Je découvre, après le souvenir de la grêle deux mois plus tôt, des falaises brillantes de soleil, veillant une riche diversité, héritée d’une longue tradition pastorale et paysanne. Samedi 18 octobre, c’est le dernier service de la saison pour le Val des Sources.
Le Val des Sources : refuge, table et héritage
_ Nous avons allumé un feu dans le poêle, on t’attend ! Chloé m’accueille avec son papa Claude. Colette, sa mère, est en cuisine. Son témoignage passe par l’assiette, il faudra l’accueillir par ce biais. Elle me laisse entrer dans son domaine avec un sourire muet. Elle m’invite à m’approcher des morceaux de chèvre qu’elle vient de dessaler. Elle lave les légumes qui constitueront la base du pot-au-feu de chèvre. De magnifiques choux-navets, carottes qu’elle sélectionne avec soin.
Chloé et Claude ont les traits tirés. Je les interviewe en cette éreintante fin de saison. Le soleil décline, quelques rayons entrent dans l’espace bistrot du Val des Sources. Nous nous installons sur une large table en bois, une douce chaleur se diffuse. Chloé sert un jus de pomme du coin, « le petit jaune ». Cette boisson désaltérante, parfumée de la fraîcheur caractéristique des pommes de montagne, me claque la langue : je viens d’être parachutée au pressoir de mes 11 ans.
_ Alors demain, c’est le repos ? je demande
_ Oui, dernière ligne droite ! Enfin, on a quand même tout le nettoyage qui va nous prendre un jour ou deux et ensuite : régime marmotte ! se réjouit Claude. Ses yeux pétillent d’intelligence, d’une curiosité insatiable et d’un grand besoin de partager son savoir.
_ On vit au rythme des saisons, ajoute Chloé. Quand le soleil est là, on est plein d’énergie et quand il s’en va, il ne se passe plus grand-chose dans la vallée.
Ce soir, c’est la fête de la Chèvre. Célébrée pour marquer la fin des alpages et des transhumances, l’entrée dans l’hiver et un instant de convivialité avec les êtres qui comptent. La chèvre, provenant du champ d’à côté, est salée au restaurant.
_ Ici, on a voulu garder ce vieux savoir-faire de saler avec l’os, au mois de septembre. C’est une belle manière de se dire au revoir avant d’entrer en hibernation, pose Claude.
L’hôtel n’est pas coupé du monde en hiver, les routes restent praticables mais peu s’y aventurent. Le soleil revient pour un premier appel le 19 février.
_ Mais nous, on se réveille à Pâques ! Un peu avant, car il faut préparer l’ouverture et il y a les mises en place.
Le repos n’est pas totalement complet. Il y a toujours des petits travaux d’entretien dans l’hôtel. Claude garde le café ouvert tous les soirs, de 18 h à 20 h, pour que les gens du coin puissent avoir un lieu où se retrouver et échanger. Casser la solitude, offrir un espace de parole et d’échange pour briser les longs silences hivernaux.
_ Par contre, à Pâques, quand tu commences, c’est parti : sept jours sur sept, matin, midi et soir, de longues journées jusqu’à fin octobre.

panais et navet prêts à être découpés
Ma mère était persuadée que le tourisme avait de l’avenir ici, raconte Claude. Tous les deux, ils n’ont rien. Mon grand-père est prêt à leur céder son plus grand pré. Il a 25 moutons, deux vaches, il fait partie des pauvres.
Claude Gueydan
Traditions, terroirs et résistances culinaires
Simone, Colette, Chloé : soixante ans de cuisine vivante
C’est un lieu de villégiature pour les familles, les randonneurs, les amoureux.
Le bâtiment est assez fidèle aux constructions de l’époque. Massif. Mais son cœur est vibrant et en constante recherche d’évolution. Simone, Colette puis Chloé perpétuent de génération en génération le patrimoine hérité au coin des fourneaux. Elles ajoutent leur singularité pour amener plus loin ce qui a été donné, afin de le rendre accessible à leurs contemporains. La ligne tenue durant ces soixante ans d’existence, Chloé l’explique dans sa définition de la tradition :
_ C’est une pratique liée à son territoire et à son terroir. C’est être à l’écoute de son environnement, travailler avec lui et ce qu’il offre. Une essentialité qui se traduit par la valorisation du temps, de la géographie, des êtres humains dans leur savoir-faire et leur savoir-être.
Ouvert en 1965 par les grands-parents paternels de Chloé : Simone et Claudet. Ils avaient une trentaine d’années, un peu plus âgés que Chloé aujourd’hui. Lui, cordonnier en faillite ; elle, professeur de commerce (au privé), qui venait du monde de la boucherie.
_ Ma mère était persuadée que le tourisme avait de l’avenir ici, raconte Claude. Tous les deux, ils n’ont rien. Mon grand-père est prêt à leur céder son plus grand pré. Il a 25 moutons, deux vaches, il fait partie des pauvres. Il leur dit : votre idée, vous avez sûrement raison, allez-y, faites un hôtel dessus. Il fait tapis ! Parce que tu lui enlèves ce pré, il meurt. Ils empruntent 16 millions deux centimes de francs et ils construisent la carcasse du bâtiment.
L’esprit paysan domine. L’arrière-grand-père de Chloé produit tous les légumes de l’hôtel-restaurant, ouvert toute l’année. Ce qui n’a rien d’anecdotique. Car durant les années 70, la grande mode en restauration était aux longues cartes exotiques, dans lesquelles on trouvait ce qui était « raffiné » pour l’époque et où les spécialités locales étaient méprisées pour leur appartenance aux « milieux populaires ». Du surprenant, de l’extravagant, du luxe accessible mais aussi de la typicité. La gastronomie française vivait son plus grand paradoxe : faire rayonner sa culture à l’international via le tourisme, mais avec des produits issus de l’agro-industrie. Optimiser ses coûts, faire de la marge, entrer dans le grand jeu capitaliste.
C’est un éternel recommencement. On nous crée des besoins de consommation qui n’existent pas.
Claude
Maintenir la tradition face aux modes et à l’industrie
_ Il y avait deux énormes potagers autour de la maison, se souvient Claude. Simone aimait cuisiner le chou-fleur, tout ça… Bon, après, ça a été les grandes années 70, celles de la malbouffe, du glutamate, les marchands de mico et compagnie qui arrivent avec tous leurs trucs surgelés… Déjà, la grand-mère de Chloé a lutté contre ! Ce qu’elle a pu.
Lutter contre, cela signifiait proposer des produits les plus naturels possibles, essayer de garder un cap tout en ménageant la pression de la clientèle pour ce qu’elle estime être juste : un très large choix, des repères emblématiques, sans se poser la question ni des saisons, ni des logiques de terroir.
_ Pour nous, le bio, c’était une évidence même si ce nom n’existait pas. Et là, tout s’est transformé dans les comportements : ces fameuses cuisses de grenouille de Thaïlande, le poulet à l’américaine avec l’écrevisse turque… Dans les années 70-80, le développement de l’industrie agroalimentaire a fait qu’il fallait de tout, n’importe où, n’importe quand ! s’insurge Claude. C’était incroyable ce qu’on mangeait à cette époque-là. Le consommateur est toujours fautif, car c’est une éponge et on peut lui faire gober ce qu’on veut ! Avec Colette, quand nous avons repris, on a décidé de dire non à tout ça. Là où nos collègues restaurateurs me disaient : "vous allez vous planter, c’est pas possible de proposer qu’un menu."
Le pari est pourtant remporté sur le long terme. Colette reprend la cuisine assez jeune et dans une période économiquement délicate. Ils sentent qu’il faut prendre un virage, sans se trahir.
_ Sur la fin des années 80, on était un peu à la limite, se livre Claude.
Chloé l’interroge du regard.
_ C’est venu de quoi ?
Ils engagent un dialogue.
_ Ton grand-père disparaît, il y a un flottement. Savoir où on va, ce qu’on fait et comment.
_ Quand vous avez repris, avec maman, vous avez fait le bar.
_ Non ! On a commencé par mettre des douches et des toilettes pour tout le monde : à l’étage, il n’y avait que des sanitaires sur le palier.
Pour se diversifier, Claude et Colette ajoutent une activité équestre. La mode est aux activités. Ils ouvrent une buvette et le restaurant devient très simple : de grandes tablées, dans une identité proche de l’auberge.
_ Le vrai renouveau, c’est Colette qui l’a amené, avec son choix de cuisine. La tradition, c’est beau mais elle ne doit pas être dans le mauvais sens de la pensée du moment, explique Claude
_ Je n’arrive pas à vous imaginer avec trente chevaux ici ! Ça me paraît fou ! s’esclame Chloé.
Ils engagent ensuite des travaux dans le bâtiment, créent un bar pour éviter le mélange des genres.
_ Avant, le salon de l’hôtel faisait bistrot, réception, tout. Alors, des fois, tu avais des bandes de jeunes qui faisaient l’apéro, des gens qui voulaient manger au restaurant, c’était un peu compliqué. On fumait tous partout.
Vient la rénovation du chauffage et une réflexion sur la production de l’eau. De nouveau, dans les années 2000, il faut prendre un virage. Celui-là moins en accord avec leurs valeurs.
_ Après les années 2000, on a mis une piscine. Jeunesse et Sports obligeaient un moniteur et de plus en plus de normes. On ne pouvait pas se le permettre financièrement. On se rend compte aussi que notre clientèle évolue, qu’elle demande plus de confort, plus de services… Et donc on laisse de côté les chevaux. Et la piscine vient les remplacer. Ce n’est pas la chose à laquelle j’adhère le plus mais ça donne une carte de visite.
Claude a un mouvement en arrière.
_ Nous avons une photo sur laquelle on voit le grand-père labourer le potager avec le cheval. Se rappelle-t-il. À la place, maintenant, il y a la piscine. Alors, à ton avis : il vaut mieux quoi aujourd’hui, une piscine ou un potager !? C’est pour te dire que même si tu es engagé, il y a des choses sur lesquelles tu cèdes, il y a des contradictions.
Dans les années 2012, un espace bien-être est créé et ils engagent une réflexion sur la dépendance aux énergies fossiles. Ils investissent dans du solaire et du thermique.
_ L’installation produit environ quatre mille litres d’équivalent fioul. Tout ça dans un pays où il n’y a pas de soleil ! s’amuse-t-il. Mais vu qu’on dort quand il s’en va… ça nous convient parfaitement ! Tu vois, me dit-il, le régime marmotte, il est vertueux ! Ils échangent des regards complices.
Certaines choses, en revanche, ne changent pas : tous les draps sont un mélange satin-coton, ils disposent de leur propre blanchisserie et d’un poste de lingère.
_ On fait tout sécher en extérieur. Les draps sentent le soleil. Et les clients ont juste envie de nous embrasser pour ça !
Viser la richesse dans la sobriété
_ Il y a eu beaucoup d’évolution dans la gastronomie avec des simplifications qui font gagner du temps, ajoute Chloé. Dans notre cuisine, on ne gagne jamais de temps. Au contraire ! On accepte de le perdre en le prenant ! C’est notre identité.
Leur atout principal : une clientèle d’habitués qui leur a permis de tenir et d’installer une identité forte, recherchée par ceux qui viennent faire du séjour.
_ On n’invente rien ! ajoute Claude avec malice. C’est un éternel recommencement. On nous crée des besoins de consommation qui n’existent pas. Il faut que les clients aient des choix, mais des choix dans les valeurs qu’ils reconnaissent, et du coup ils en acceptent la limitation. Et surtout, ils recherchent une idée du goût.
Ils ont réussi à embarquer leur clientèle dans leurs convictions.
_ Avoir affirmé ça, ajoute Chloé, induit chez les gens une absence d’exigence qui ne serait pas adéquate. Ça ne leur vient pas à l’idée de nous demander quelque chose que l’on ne fera jamais.
Les bases, c’est le lien. Des approvisionnements les plus directs possibles et une autonomie dans la transformation, notamment des viandes. Elles sont achetées sur pied, aux fermes d’à côté. Claude fait lui-même les salaisons, les charcuteries, les affinages. La viande, ici, on la travaille rassise. Jamais fraîche. On mature tout.
Un travail rythmé par les saisons, les troupeaux, la montagne. Et dans cet effort, ils recherchent la caractéristique de l’histoire des goûts, du terroir.
_ Le premier produit emblématique qui me vient, c’est l’agneau, développe Chloé. Il est vraiment caractéristique. Ici, il n’y a pas assez de place pour des vaches. Trop peu de prairies. Les troupeaux partent en transhumance tout l’été dans les alpages. C’est magnifique. Unique. Les animaux vivent dans de très bonnes conditions, ils font vivre des gens, entretiennent la montagne. Et leur goût est incomparable. Il a celui du dehors et de l’altitude.
Mes premiers éveils gustatifs, je les ai vécus avec ma grand-mère. La cuisine, c’était d’ailleurs notre principal lien
Chloé
Un autre produit emblématique : l’épinard. Légume montagnard par excellence, il se cultive très bien sous ces latitudes. À l’origine, c’est son cousin sauvage, le Chénopode bon-Henri, qui était récolté là où les bêtes passaient, le sol étant fertilisé par leur fumier. Longues feuilles duveteuses et pointues, elles sont nommées oreilles d’âne. Constituants de la farce, elles donnent leur nom à un plat de pâtes fraîches, cuit au four dans de la crème.
Enfin, la pomme de terre, réduite en purée, agrémentée de fromage frais et d’un œuf, est roulée en forme de gnocchi puis frite et constitue la Raviole du Valgaudemar (sans lien avec les ravioles du Dauphiné).
_ C’est le plat de mon enfance dont je ne me lasserai jamais ! On les mange avec une confiture de framboise ou de myrtille que l’on fait nous-mêmes, et du miel. C’est aéré, croustillant et moelleux. C’est très réconfortant.
Le sourire habite la voix de Chloé quand elle décrit ce plat.
Chloé ne se destinait pas à reprendre le Val des Sources. Enfant, ce n’est pas un sujet ni une projection. L’hôtel-restaurant, elle le vit à travers sa grand-mère et ses parents. Simone et Colette ont travaillé en cuisine pendant cinq ans. C’est à la naissance de Chloé que la passation se décide. Simone se retire des cuisines pour s’occuper de sa petite-fille et Colette prend les cuisines en main.
_ Mes premiers éveils gustatifs, je les ai vécus avec ma grand-mère. La cuisine, c’était d’ailleurs notre principal lien, raconte-t-elle. Les pâtisseries réalisées à partir des fruits du verger, les gâteaux aux pommes et au yaourt, les décors en tressage de pâte sur les tartes et les compotées gourmandes habillent son enfance de cet univers sucré.
_ Elle m’a aussi transmis son goût du Sud et des recettes qu’on ne trouvait pas chez nous. Les moules marinière, les moules et les tomates à la provençale, la bouillabaisse, les Saint-Jacques farcies ! C’était unique en cet endroit, vraiment inhabituel. Et bien sûr, l’ail ! Elle mettait beaucoup trop d’ail… Chloé rit. Mais j’adore ça ! Dans ma cuisine, j’essaie de le doser mais si je m’écoutais…
Avec sa grand-mère, elle fait son éducation aux goûts. Elle comprend à ses côtés l’importance de savourer, de prendre le temps de décoder les aliments, que chaque saveur est importante et raconte une histoire qu’il faut savoir écouter. C’est une priorité.
_ Simone a transmis toutes ses recettes à ma mère quand elle l’a formée pour le restaurant. Avec elle, j’ai fait aussi de la pâtisserie. Je pense que c’est ce qu’il y a de plus simple avec un enfant : moins dangereux et plus accessible. Toutes les deux, nous réalisions souvent un savoureux gâteau au chocolat et à la framboise. C’est plus tard que nous sommes allées vers le salé.
Adolescente, Chloé aide sa mère durant les saisons comme « petite main ». Une première acculturation au milieu de la cuisine professionnelle.
_ Ma mère m’a transmis sa passion, son amour, sa patience pour la cuisine tout au long de notre vie. Nous prenions tous nos repas ensemble et la notion de partage est vraiment très forte chez nous.

Chloé et Colette
Ce n'est pas facile une succession. En fait, c’est terrible d’hériter. Il marque une pause. C’est terrible. En termes de responsabilité, de poids, de cause à effet. Il y a tout qui se mélange.
Claude
Chloé : créer sans trahir, inventer sans rompre
Reprendre le Val des Sources a été une longue décision, qu’elle a pris le temps de mûrir. Chloé est partie vivre au Canada pendant trois ans. Elle y découvre son identité d’Européenne. Mais surtout, prend conscience de la richesse de son territoire et de la volonté de participer à le préserver.
_ Je ne me vois pas faire de la cuisine ailleurs qu’ici. C’est un endroit que je ne pourrai pas quitter, ce sont mes racines et les montagnes, je les adore. Vivre en Europe, dans les Écrins, d’avoir cette culture gastronomique et cette culture de vie, dans ce cadre-là, c’est tout de même incroyable.
Elle décide de se former en cuisine, d’abord par choix stratégique : si je dois embaucher quelqu’un en cuisine, je dois savoir de quoi il retourne, justifie-t-elle. Chloé se rend à Grenoble pour intégrer un CAP de reconversion professionnelle (l’IMT). Elle bénéficie de conditions d’apprentissage optimales et se découvre une passion.
_ Ça m’a plu. J’ai ensuite été prise en alternance à Paris où j’ai énormément appris. Avant de revenir, j’ai été confrontée à un gros dilemme : j’avais besoin d’être en lien avec la culture, que l’on trouve plutôt en milieu urbain. La scène, les arts et la musique sont très importants pour moi et je voulais y contribuer.
Elle tranche en faveur de la cuisine. Elle y entrevoit un terrain d’exploration et de créativité qui pourrait faire un compromis. Elle revient donc auprès de Colette au Val des Sources, mais cette fois en tant qu’adulte, avec la volonté de se former. Une nouvelle transmission s’opère. Professionnelle cette fois. Elle y apprend les techniques de conservation, les salaisons, les recettes de sa grand-mère.
_ Cette fois, j’y apprends l’exigence et surtout une manière d’atteindre un résultat qui convienne parfaitement à l’idée que l’on s’en fait.
Cet environnement est vital à Chloé et lui permet de mettre du sens dans ses actions.
_ Je me sens en lien, c’est une vraie source d’énergie pour travailler en cuisine. Les producteurs auprès desquels nous allons chercher les produits travaillent très fort. Leur matière première est belle, et la cuisine est là pour en parler. Je n’aurais pas le même plaisir si je devais acheter mes ingrédients en grande surface. Il faut du lien, il faut de la transmission. En allant récupérer la viande, les fruits, les légumes, la farine, le pain, l’huile de noix, les fromages et les vins, il se tisse une forme de soutien, de solidarité, d’encouragement et de partage commun.
Le prix du menu du Val des Sources n’est pas représentatif du travail qu’il demande. La qualité de la matière première est également exceptionnelle. Et, au regard de l’engagement pris sur les approvisionnements, le prix est très correct.
Le Val des Sources a toujours été tourné vers une clientèle touristique, du séjour, des pensionnaires. Une logique induite par l’histoire d’un pays que Claude qualifie de miséreux. L’arrivée de la bourgeoisie étrangère et parisienne en manque d’aventure crée une opportunité au cours du XIXᵉ siècle. L’essor de l’alpinisme va permettre aux habitants qui ne se décident pas à l’exode rural de subvenir à leurs besoins.
_ Soit tu travailles le mouton, soit tu le fais manger, constate Chloé. Les deux marchent ensemble. La vie, on n’a pas envie de l’éteindre ici, sinon il n’y a plus rien.
D’après eux, l’implantation d’un restaurant gastronomique n’est pas envisageable pour les gens du coin : trop éloigné de leur culture de consommation.
_ Nous sommes considérés comme très chers par les gens du pays, confie Claude. Pour eux, ce n’est pas possible de mettre cinquante balles sur une table. C’est inconcevable !
Et de l’autre côté, prendre conscience que la clientèle continue d’avoir ses exigences, agitée par le conformisme…
_ Quand tu viens manger chez nous, tu sais que tu vas passer du temps à table. C’est un menu qui va coûter de l’argent. On a su garder l’esprit de terroir mais les gens veulent plus que ça aujourd’hui. Et moi j’essaie d’apporter cet aspect bistronomique pendant l’été.
_ Sauf ce soir, avec la fête de la chèvre, nous sommes les deux pieds dans la tradition du repas de foire. On retourne au Moyen-Âge là ! s’amuse Claude.
Ce soir, il y aura des gens du pays, des fournisseurs aussi, essentiellement des clients devenus des amis et qui se rassemblent en famille, sur trois générations. Des grands-parents venaient petits en ce lieu.
Je suis appelée silencieusement mais d’autorité par Colette pour prendre en photo la cuisson des choux. Je suis subjuguée par leur couleur, leur fermeté et les parfums qui commencent à s’échapper. Une sensation de fraîcheur, de vitalité et de minéralité se concentre sous le couvercle.
Je retrouve Chloé et Claude. Ils échangent sur l’avenir.
_ La population locale, elle te met parfois en colère…
_ Oui, sur les thématiques qui animent ma génération, comme le féminisme, l’écologie… mais j’ai envie de prendre ma place, de manière peut-être différente de ce qui m’entoure pour apporter autre chose.
Et dans ce lieu, j’y vois une programmation culturelle possible. Alors certes, à mon échelle, en tout cas pour l’instant.
Chloé a co-fondé un collectif regroupant des femmes DJ : les Louves du Groove, qui enflamment la scène régionale de Gap à Grenoble en passant par Marseille. Le groupe s’étoffe d’autres artistes, de photographes… L’idée est de visibiliser les femmes dans le milieu du dancefloor, et d’amener une dimension d’adelphité, de sensibilisation aux violences sexistes et sexuelles pour faire des moments de fête des espaces sûrs.
Amener la culture jusqu’au Val des Sources, c’est une manière pour Chloé de s’inscrire dans son temps et d’apporter sa marque, en plus de ses explorations en cuisine. Cet été, elle a organisé quatre concerts et une exposition. Pour l’été prochain, elle réfléchit à programmer de la danse, du théâtre et du spectacle vivant.
_ Le DJ set, avec les Louves, c’est super mais générationnel. Ça scinde. C’est au risque de créer une distanciation du type : « C’est Chloé qui fait sa boom ». Ce n’est pas une offre facile à proposer aux gens d’ici ou aux clients. Alors que le concert acoustique résonne, a plus d’impact. Il a grêlé, il faisait un froid polaire en plein été, et bien c’est là où j’ai eu les retours les plus positifs. C’est à moi de me questionner sur ce que je peux construire sans penser à ce qui me ferait plaisir directement. Il va falloir mettre un peu des deux et trouver un équilibre.
En revanche, dans sa cuisine, son assurance est solide. Elle gardera un menu traditionnel mais apportera de la nouveauté sur les cuissons des viandes afin d’amener son terroir encore un peu plus loin. En s’inspirant des cuissons basse température, de la maîtrise du feu, elle sent que l’alchimie va prendre. En revanche, la raviole et les oreilles d’âne sont des plats qu’elle ne revisitera pas :
_ Ça a un sens gustatif et éthique. Mes prédécesseuses les ont amenés là où ils doivent être. L’enjeu est de maintenir le niveau.
Elle a envie de s’engager sur le travail de la farine. Leur fournisseur est un minotier du Trièves et Chloé veut s’investir dans cette dimension pâtissière salée. Aller chercher le travail du levage et du fourneau, la dextérité des cuissons des viandes et des légumes. Ce mélange coïncide bien avec ce qui l’unit aux femmes de son enfance !
Bien que ce ne soit pas sa spécialité, elle ouvre sa carte et propose à ses pensionnaires un menu végétal par semaine, de l’entrée au dessert.
_ On va chercher un plat technique, avec beaucoup de texture, de goûts et d’équilibre. Et insister sur la consistance ! Il y a un enjeu de sensibilisation des clients à cet endroit, car ils ont peur de ne « pas avoir assez », de ne pas être « rassasiés » sans la viande.
Ce sont des préjugés à renverser progressivement. Chloé s’est entourée pour travailler le végétal. Un de ses amis chefs est un collaborateur important.
_ Il apporte ce côté-là. Ce n’est pas tout à fait dans la culture mais le terroir est bien présent en alliant délicatesse et complexité.
Les échanges glissent doucement vers un dialogue en simultané. On touche la question de la passation et Claude partage ses questionnements :
_ Ce n'est pas facile une succession. En fait, c’est terrible d’hériter. Il marque une pause. C’est terrible. En termes de responsabilité, de poids, de cause à effet. Il y a tout qui se mélange. Tu hérites d’un gros paquebot qui a aussi ses casseroles.
_ J’estime que c’est un beau paquebot, le coupe Chloé. Il n’y a pas que des casseroles !
_ Oui mais ce que je veux dire, c’est que tu sèmes ce que tu récoltes ! Et pour la pérennité de l’entreprise, il ne peut pas y avoir de rupture franche du jour au lendemain. Il faut que les choses viennent petit à petit, avec le changement de personnalité. Il ne s’agit pas tellement du poids de notre regard, mais de la vision pour le lieu et de la manière dont tes clients vont te percevoir, tes voisins… Comme ça s’est passé sur les générations d’avant : il y a eu une continuité et une évolution. Quand tu es au moment de la transmission, tu te demandes ce que tu as semé. Parce que celle qui va ramasser, c’est ta fille ! Et la sanction, elle vient vite !
_ Non mais vous n’avez pas du tout semé des casseroles ! Chloé le reprend durement.
_ Non mais tu prends tout !
_ Papa !
_ Oui, pardon.
Claude repose ses mains sur la table et regarde sa fille avec attention. Elle lui lance un regard et prend sa respiration.
_ Ce que je voulais dire, c’est que je pense que les gens nous font énormément confiance. Ils me connaissent : je n’étais même pas née qu’ils étaient là !
Claude me lance un clin d’œil. Tous les anciens clients lui ont fait des cadeaux de naissance. Elle y est dans le truc ! C’est pour ça qu’il ne peut pas y avoir de rupture franche.
_ Mais c’est pas du tout ce que j’ai envie de faire ! Je ne vais pas tout changer ! C’est plus une continuité de tout ce qui a été fait avant. C’est tellement beau que j’ai juste envie de le valoriser et de le mettre à ma manière. Après, si, les trucs que j’ai envie de changer, ce sont les animaux empaillés ! Elle rit. Claude s’agite tout en gardant son sourire. Ça, je vais les enlever, c’est sûr ! Elle enfonce le clou avec malice : je pense que l’année prochaine, il n’y en a plus ! Sauf peut-être le bouc, parce que j’avoue, je l’aime bien ! Mais c’est tout !
Ils rient de bon cœur.
La lumière a tourné, elle décline doucement sur le bord de la table. Un coup d’œil à la pendule. Il est temps de repartir en cuisine. Déjà les portes s’ouvrent et se ferment, une effervescence monte. Les pensionnaires commencent à revenir de leur balade. Il reste deux petites heures avant le service. Chloé noue son foulard et prend la direction des cuisines.
Avec sa mère, les échanges se font sans mot. Chacune à son poste, elles savent exactement où elles se situent, à quel stade elles se trouvent. Chacune enchaîne les gestes comme un ballet longuement répété. Une communication qui se passe de mots.
La fête de la Chèvre : liens, mémoire et communauté
Je suis sortie, mes pas me mènent vers les prés. Claude m’avait suggéré d’aller voir les chèvres, «l’éleveur, Pierre, est l’un des partenaires du Val des Sources». Tout en me recommandant de faire attention : « les patous sont dans les filets mais ils ne sautent pas. »
Je suis à moitié rassurée.
Le troupeau est paisible. Je ne les repère pas tout de suite mais eux m’ont vue. Je m’en aperçois plus tard sur mes clichés : des têtes tapies dans l’herbe, le regard braqué dans ma direction. Et lorsque je m’avance, ils ont déjà fondu sur moi. Le filet nous sépare. Ils me jaugent. Je sors mon objectif calmement, et m’approche progressivement. Mais dès que je me positionne vers une chèvre, l’un des patous se place ostentiblement devant elle. En observant le troupeau, je repense à ce que Claude évoquait sur la question de la filière abattage, de plus en plus menacée dans la vallée, malgré la réfection de l’abattoir de GAP.
De manière structurelle, les abattoirs publics disparaissent.
Vendus ou fermés, centralisés et rendus à grande échelle, le stress pour les animaux a été démultiplié.
Claude s’en inquiète. Lui qui, toute sa vie, a « traîné » vers les abattoirs, défend cette idée de la proximité.
Le risque, c’est de détruire les filières entières et de devoir se rabattre vers d’autres terroirs.
On nous pousse à aller vers du label Sisteron alors que nous avons notre propre terroir ici, on hallucine un peu, avait-il lâché.
L’autre menace qui pèse sur la vallée est celle du changement climatique.
Si elle est intéressante pour développer plus de maraîchage et d’arboriculture en altitude à court terme, la gestion de l’eau est une vraie préoccupation. Les crues violentes sont un sujet d’inquiétude, tout comme la montagne qui tend à s’effriter, se fragiliser peu à peu.
Les heures passent doucement. Nous partageons encore du temps avec l’équipe, et Chloé en profite pour me montrer les diverses constructions de son papa _ notamment un canevas en bois pour la fabrication des ravioles.
Un repas comme une mémoire : renouer avec ses origines
Enfin, nous prenons place à table. Je partage ce repas avec ma petite sœur Camille qui, elle, a choisi de vivre pleinement son amour de la montagne en installant ses valises dans ce pays.
Claude a choisi un vin blanc savoyard pour l’apéritif.
Un joli clin d’œil à nos origines dont nous lui sommes reconnaissantes.
Durant cette nuit, Colette, Chloé et Claude m’auront permis de remonter le fil de mon propre temps.
À travers les leurs, j’ai pu renouer avec mes origines, qui me manquent cruellement. Le vin est à l’image des locaux de mon enfance : il ne se dévoile pas. Pas tout de suite.
Avec les montagnards, il faut accepter que cela prenne du temps.
Parfois même toute une vie.
Notes d’olive, minéral. Rose blanche, première fraîcheur hivernale.
Je me retrouve dans les promenades avec mes propres grands-parents dans les vignes de Chignin et d’Apremont.

Pot au feu de chèvre par Colette
Je ne dévoilerai pas le secret des cacahuètes ultra locales du Val des Sources.
Mais elles remplissent les doigts d’un plaisir gourmand et impertinent, totalement addictif.
Au fil des plats, nous suivons cette ligne tendue vers notre propre histoire, tout en vivant une immersion dans le creux d’un massif qui n’est pas le nôtre.
Nous nous lovons dans cet univers tendre et généreux, tout en hauteur et en profondeur.
Le pot-au-feu de chèvre, dans ses notes herbacées et fondantes, nous bouleverse.
Une impression de proximité intime avec ce plat nous surprend, remontant trop loin pour que l’on puisse reconstituer nos souvenirs.
Dans cette saveur marquée et sinueuse, les légumes apportent de la joie, de la finesse et une sensation de fraîcheur qui emporte tout.
Les charcuteries, trésors délicatement sortis des séchoirs, s’évaporent sur nos langues, ne laissant qu’une empreinte saline que la mémoire capture précieusement.
La soirée se poursuit dans une montée sereine vers les confins d’un intense sentiment de sécurité, de réconfort, de lien.
Les siècles reviennent en quelques bouchées.
Un espace-temps agrandi dont les artisanes et artisans du Val des Sources sont les gardiens.
La signature est formalisée début novembre.
J’appelle Chloé : elle se sent bien d’avoir finalisé cette passation.
« Le lieu va me ressembler, c’est une belle continuité avec mes parents, qui eux, pourront se reposer. Je suis heureuse pour eux. »

chèvre et mouton à l'enclos

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